Les régulateurs ne chôment pas cet été. Quels impacts sur votre job en finance ?
Pendant que vous êtes peut-être en train de vous prélasser sur le sable au bord de la mer, sachez que dans le même temps les régulateurs et les organismes de place continuent de travailler à l'élaboration de nouvelles réglementations, notamment dans le contexte post-Brexit. Voici donc les répercussions auxquelles vous attendre à votre retour de vacances, en fonction du secteur d'activité financier dans lequel vous travaillez :
Banque, assurance, finance d'entreprise
Chez Paris Europlace, on ne chôme pas cet été ! Après avoir organisé les rencontres financières internationales début juillet où il était question de soutenir l'attractivité de Paris dans le sillage du Brexit, l'organisme de promotion de la place financière parisienne a réuni cette semaine, sous un soleil de plomb, associations professionnelles et grands établissements du secteur financier à l’occasion du dialogue franco-italien sur les services financiers.
Concernant la négociation à venir entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni, Paris Europlace a rappelé l’urgence de décisions, avec notamment la mise en application rapide de l’art. 50 du Traité de l’UE. Paris Europlace milite pour la perte du passeport européen pour les entreprises situées au Royaume-Uni et l'instauration d’un « level playing field » en matière de réglementation prudentielle et de supervision par les agences européennes, avec une réciprocité en matière d’exercice des activités financières.
Impacts sur les professionnels : parmi les pistes évoquées, on peut retenir le retour de la compensation (clearing) des transactions en euro sur le territoire de l’UE, de même que la relocalisation de l’Autorité Bancaire Européenne (EBA) qui emploie plus de 150 personnes à Londres. A retenir également : la volonté de la place de Paris maîtriser des infrastructures de marché et de compensation, d'accueil des entreprises financières non européennes sur le territoire de l’UE, et la facilitation de l’emploi dans le secteur financier.
Les professionnels ECM-DCM devraient quant à eux voir d'un bon oeil l'accélération de l’Union des Marchés de Capitaux, avec notamment la relance d’une titrisation aux règles véritablement praticables, le ralentissement de la surrèglementation et l'application stricte du principe de « better regulation ».
« Il est bien nécessaire de maintenir un environnement favorable au développement encadré des activités de titrisation dans la perspective d’apporter un éclairage complémentaire aux contributions de l’industrie financière et de favoriser les conditions d’accès des entreprises au marché de la titrisation, en tant que mode de financement alternatif au financement intermédié, drastiquement règlementé depuis Bâle III », rappelle l’Association Française des Trésoriers d’Entreprises (AFTE).
Enfin, banquiers et assureurs n'ont pas été oubliés, avec la finalisation d'une réglementation prudentielle en ligne avec les recommandations du B20, « A cet égard, il est essentiel que les travaux en cours du Comité de Bâle ne conduisent pas à une augmentation des exigences en fonds propres pour les banques européennes, et que les révisions de Solvabilité II pour une meilleure calibration facilitent le financement de l’économie », souligne Paris Europlace dans un communiqué.
Fonds d'investissement / Private Equity
En amont du lancement d’un fonds, les professionnels peuvent avoir besoin d’échanger avec des investisseurs potentiels afin de tester l’accueil qui sera fait au produit. Or, jusqu’à présent, certaines formes de présentation ou d’échanges avec des investisseurs pouvaient être qualifiées d’actes de commercialisation qui déclenchaient l’application de règles parfois mal adaptées au stade de développement du produit. Aussi, afin d’encourager l’innovation, de faciliter la création de nouveaux fonds en France et de donner une sécurité juridique aux acteurs, l’Autorité des marchés financiers (AMF) vient d'introduire en France le concept de « pré-commercialisation » des fonds
Ainsi, la pratique consistant pour des sociétés de gestion à se rapprocher de 50 investisseurs au plus (professionnels ou dont la souscription initiale serait supérieure ou égale à 100.000 euros) afin d’estimer leur appétence préalablement au lancement d’un OPCVM ou d’un FIA, n’est pas constitutive d’un acte de commercialisation dès lors qu’elle n’est pas accompagnée de la remise d’un bulletin de souscription et/ou de la remise d’une documentation présentant une information définitive sur les caractéristiques du fonds. En revanche, la souscription éventuelle, ultérieurement, par les investisseurs approchés sera considérée comme constitutive d’une commercialisation.
Ce qu'en pensent les professionnels : « Nous sommes très satisfaits de la flexibilité apportée par l’AMF avec le nouveau concept de « pré-commercialisation » qui permettra aux sociétés de capital-investissement de tester, dans un cadre juridique sécurisé, l'appétit des clients potentiels, et de faciliter en conséquence la constitution des fonds en adéquation avec leurs attentes », déclare à ce sujet Oliver Millet, président de l’AFIC.
FinTech
L’Autorité des marchés financiers et l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ont lancé le 18 juillet le Forum FinTech, nouvelle instance consultative et de dialogue avec les professionnels des FinTech visant à mieux appréhender les enjeux de réglementation et de supervision liés à l’innovation financière.
Instance de veille, de dialogue et de proposition associant les sociétés innovantes, les pouvoirs publics et les autorités de supervision, le Forum permettra de mieux appréhender les enjeux associés au développement des FinTech, à la fois en termes d’opportunités et de risques éventuels. Le Forum pourra ainsi être consulté sur d’éventuels projets nationaux ou européens d'évolution de la réglementation ou d’amendement de la doctrine de l’AMF et de l’ACPR. Il pourra également faire part aux autorités de supervision des sujets de préoccupation des professionnels.
Ce qu'en pensent les régulateurs : « La transition numérique qui s’accélère dans le domaine des services financiers implique un profond changement de nos repères. En tant que régulateur, nous y voyons de nombreux bénéfices en matière de traçabilité et de transparence, relève Gérard Rameix, président de l’AMF. Nous saurons donc accompagner ceux qui innovent en leur permettant d’installer leurs activités sur un terrain sécurisé, propice au développement et garant d’une protection efficace pour les épargnants qui ont besoin d’avoir confiance en ces nouvelles offres ».
« Une réglementation adaptée est un facteur essentiel pour assurer l’attractivité de la place financière de Paris pour les Fintech, en particulier dans le contexte actuel marqué par le Brexit», souligne Axelle Lemaire, secrétaire d’Etat chargée du Numérique. « Notre ambition est d’être une place d’excellence tant par le niveau de sécurité que d’adaptation des réglementations, susceptible à ce titre d’attirer les meilleures initiatives en matière de FinTech et d’innovation financière », indique François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France et président de l’ACPR.
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