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Les quatre métiers en banque qui font le plus rêver… à tort

Attention à ne pas trop idéaliser certains métiers...

Et si la réputation des métiers de banquier d’affaires, d'analyste, de vendeur en salle de marchés ou encore de banquier privé était surfaite ? Il ne s’agit pas ici d’exclure ces professions de vos options de carrière, mais plutôt de vous inviter à la vigilance. Soyez lucide, car entre le rêve et la réalité, il y a souvent un fossé.

Analyste financier

La bulle technologique au tournant des années 2000 avait porté aux nues des analystes stars – des gouroux tombés aux oubliettes aussitôt la crise survenue. Avec les subprimes, la crise de la recherche actions est devenue bien plus structurelle. « La recherche actions est un produit très visible et facilement disponible, qui est exigé par les gérants d’actifs mais pour lesquels les clients sont réticents à payer », explique Brad Hintz, un analyste senior de Wall Street reconverti depuis peu dans l’enseignement supérieur à l'Université de New York.

Le problème fondamental vient du fait que la recherche equity n’est tout simplement pas rentable. « L’activité de trading equity fait face à des problèmes de marge », explique Brad Hintz. Elle génère en moyenne une marge avant impôts de 13,5%. Si vous enlevez les opérations sur les dérivés actions, ce chiffre passe à 9,5% ».

Avec la crise de 2008, les volumes d’exécution ont fondu et avec eux les budgets de la recherche actions sont passés de 8,2 milliards de dollars en 2007 dans le monde à 4,8 mds en 2013, selon une étude du cabinet britannique Frost Consulting, qui anticipe une manne de seulement 3,4 mds en 2017. « La recherche est en danger du fait que le modèle de financement par les commissions d’exécution est moribond », résume Fabrice Bouland, CEO d’Alphametry, une startup qui a mis en place une plateforme d’accès par les assets managers à la recherche d’analystes notés à partir de la performance de leurs idées d’investissement.

Cette crise profonde a des conséquences forcément délétères pour les professionnels : « beaucoup d’acteurs abandonnent cette activité, l’externalisent et/ou réduisent les équipes, avec pour les analystes en poste une pression croissante à couvrir plus d’entreprises ou de secteurs », commente l’entrepreneur parisien, ancien trader sur dérivés actions.

En outre, la nouvelle réglementation de l'Autorité Européenne des Marchés Financiers (ESMA) visant à séparer l’exécution du financement de la recherche pour accroitre la transparence et éviter les conflits d’intérêt change définitivement la donne en matière de tarification de la recherche. Le coût de l’analyse financière, aujourd’hui payée par l’exécution et donc liée aux volumes, sera désormais soit acquitté directement par le gérant de sa poche, soit refacturé au client par le biais d’un compte de frais de recherche. « Les vendeurs actions et analystes financiers qui pouvaient prétendre à des bonus très élevés, c’est terminé ! », rappelle à ce sujet Thierry Mageux, business development director chez Robert Half Banque et Assurance.

Une aubaine pour les professionnels, estime cependant Fabrice Bouland. « Nous sommes convaincus que l’on peut enfin valoriser la recherche et mesurer son apport qualitatif pour les investisseurs grâce à l’émergence de plateformes sur Internet et à l’accès facilité aux données. Ce nouveau modèle encore émergent devrait d’ici 3 à 5 ans redonner ses lettres de noblesse à la profession, et donner une réelle chance d’exister aux indépendants », prévoit l’entrepreneur. En attendant, la carrière d'analyste sell-side ne sera pas de tout repos.

Banquier d'affaires senior ou MD

Devenir managing director, c'est peu ou prou l'ambition de chacun en banque d'investissement... Bien sûr, il y a l'argent - avec des niveaux de rémunération toujours très appréciables, même s'ils se sont éloignés des records enregistrés par le passé. Mais il y a aussi le prestige : voyager en Classe Affaires, discuter business avec moult PDG lors de grands événements ou encore avoir sous ses ordres une nuée d'analysts et associates...

« L'intérêt du poste de MD en M&A tient beaucoup aux discussions stratégiques que vous devez mener avec des clients de très haut niveau. Votre rôle est de fournir à vos clients du conseil stratégique de haut vol, générer des idées, raisonner d'un point de vue global et considérer les choses sous tous les angles possibles », rappelle Ferdinand Petra, professeur en finance affilié à HEC Paris et ex-banquier en fusions-acquisitions chez JP Morgan et Barclays.

Jusque-là, le descriptif de poste est plutôt séduisant. Mais attention au revers de la médaille... Un MD en M&A passe sa vie dans les avions, quitte à mettre sa santé en jeu ;  la politique est omniprésente et le stress se fait chaque jour plus pesant. Voici ce que William Cohan, ex-DG chez JP Morgan, écrivait il y a deux ans dans une tribune pour le New York Times : « Lorsque je travaillais à Wall Street, ma vie n'était qu'une succession infinie de soirées interminables, régies par les exigences de mes clients et de mes supérieurs », témoigne-t-il. Toujours en transit, Cohan évoque « un état de confusion quasi-permanent, toujours entre deux réunions, suspendu en permanence à l'espoir que le client signe le deal dont je lui vantais les mérites ». 

Parallèlement, les banquiers juniors ont obtenu de nouveaux droits comme l'obligation de relâche le samedi et l'évaluation de leurs supérieurs. Ce qui n'est pas pour simplifier la vie de leur aînés. Chez Barclays, les banquiers juniors peuvent maintenant signaler les managers qui ne les traitent pas bien. Désormais affaiblis, les banquiers seniors dans leur ensemble se plaignent de l'arrogance des nouveaux analystes.

Ferdinand Petra insiste sur le fait que la politique représente un autre aspect incontournable de tous les postes seniors en M&A : « à ce niveau, il devient important de ne plus faire seulement votre job ; vous devez en faire la démonstration en interne. Conséquence : outre vos nombreux déplacements pour rencontrer vos clients, vous devrez aussi voyager pour rendre visite à vos collègues des autres bureaux ! »

Vendeur en salle des marchés

L’époque n’est pas propice pour les vendeurs en salle de marchés. Les banques cherchent à réduire les coûts et misent beaucoup sur de nouveaux systèmes de trading électronique coûteux. Du coup, une proportion croissante de clients est gérée directement via des systèmes d'accès direct au marché, sans aucune intervention humaine. Un coup dur pour les équipes de vente.

Deutsche Bank donne une bonne illustration de ce phénomène. À Londres, le groupe allemand a cherché à limiter le volume des clients qui présentent des besoins basiques en les renvoyant sur un système direct d’accès au marché. Pour cela, la banque emploie désormais des traders « low touch » et des supports commerciaux à Birmingham. D’autres banques comme JP Morgan et Nomura suivent cet exemple (sans toutefois transférer d'équipes à Birmingham). À moins d’avoir un portefeuille de clients « high touch », la pérennité de votre emploi est donc remise en question.

Parallèlement, il est de plus en plus difficile de se voir confier un portefeuille de clients « high touch ». « Depuis 2008, les promotions et les mobilités dans les équipes de vente se sont réduites, explique une ex-vendeuse qui a quitté récemment Goldman Sachs. Les vendeurs expérimentés ont eu tendance à s’accrocher à leur portefeuille de clients. Par conséquent, c’est devenu beaucoup plus compliqué pour les juniors de construire leur clientèle ».

Construire un portefeuille de clients en partant de rien est un travail de longue haleine. « Dans la vente, il faut construire une relation très forte avec le client, rappelle un chasseur de têtes spécialiste des marchés actions sous couvert d’anonymat. Cela demande du temps – sortir avec les clients le soir, les emmener jouer au golf, faire du ski ou de la chasse le week-end. Cela peut être épuisant ».

De plus, une fois que vous avez convaincu un client, les procédures de due diligence pour l’intégrer en tant que client n’ont cessé de s’alourdir. Au point que dans certains cas, ce processus peut prendre des mois, indique l’ex-vendeuse de Goldman Sachs.

Les vendeurs de produits structurés, qui créent des solutions sur-mesure, sont eux préservés, puisque leurs clients sont par définition des clients « high touch ». En revanche, ils n’échappent pas aux luttes internes et à la surenchère administrative.

Banquier privé

La banque privée est certes différente de la banque d’investissement mais elle est une voie de reconversion favorite pour les professionnels las du rythme de travail infernal de la banque d’affaires. Le métier de relationship manager fait toujours rêver ces banquiers en quête d’un métier relationnel et par ailleurs très complet.

Pour Jérôme Jouanneau-Courville, CEO et associé du cabinet de chasse Norman Alex à Genève, présent également à Paris, le métier de banquier privé fait toujours rêver car il occupe « une fonction de chef d’orchestre alliant compétences techniques (produits d’investissement, dimension juridique, fiscale et patrimoniale) et compétences relationnelles (enjeu commercial et accompagnement des parcours de vie des clients) ».

Sauf que la banque privée n’est plus ce qu’elle était. « Les transfuges de la banque d’affaires sont souvent déçus car ils découvrent un métier très stressant, indique le chasseur de têtes. La pression commerciale est forte et les performances sont plus difficiles à atteindre dans un contexte économique et financier globalement moins porteur ; les clients sont plus lents dans leur processus de décision et sont de plus en plus tentés de quitter la France. Sans oublier le phénomène réputationnel : les affaires impactent le niveau de confiance des clients, ce qui nécessite une approche plus pédagogique ».

Avec les scandales HSBC et UBS notamment, les banques privées sont aujourd’hui particulièrement vigilantes. Du coup, « la quantité de paperasse que le client doit remplir et va devoir remplir chaque fois qu'il veut faire une nouvelle opération est ahurissant, témoigne le banquier privé auteur du blog Banker’s Umbrella. Le processus d'ouverture d’un compte est si long et compliqué pour le client qu’il s’apparente à un véritable interrogatoire de police. Et commencer un rendez-vous avec un prospect qui vous dit "je ne veux rien faire d'illégal" n'aide pas à construire une relation de confiance ».  

Enfin, les banquiers privés qui sont débauchés sont censés apporter un portefeuille de clients toujours plus fourni. « Des chasseurs de têtes m’ont appelé en m’indiquant que leurs clients attendaient de leur recrue qu’elle génère 100 millions d’euros d’actifs la première année, raconte le banquier bloggeur. Une exigence totalement absurde. Je connais le métier, et je n’ai encore jamais vu personne réussir cela ».

Crédits photo : Boris Austin / gettyimages

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AUTEURSarah Butcher et Thierry Iochem

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