Faut-il un doctorat pour un poste de quant en finance ? En période de pandémie, la réponse est oui…
Depuis ces dernières années, les quants sont de plus en plus recherchés par les banques et les hedge funds. Face à une demande croissante, on a vu fleurir un peu partout quantité de masters en finance quantitative. Un an après l’émergence de la pandémie de COVID, le boom des masters en finance quantitative pourrait tourner à la faillite de ces mêmes masters.
Les chasseurs de têtes à Londres et New York sont submergés par les candidatures de juniors titulaires de licences et masters, en quête de nouveaux postes de quants Mais les entreprises prêtes à les embaucher sont rares.
« Les banques et les hedge funds recherchent des individualités à qui elles peuvent faire confiance dans le contexte de télétravail – des éléments capables d’être productifs en travaillant à distance, » confie Ben Hodzic, qui dirige le recrutement quant chez Selby Jennings à New York. « L’hésitation est grande dès qu’on parle d’embaucher des jeunes diplômés ou des juniors susceptibles d’avoir besoin d’un accompagnement au quotidien et qui ne connaissent pas les données. »
Un propos qu’il tient cependant à nuancer : « Il y a en revanche une réelle appétence aujourd’hui pour des candidats avec cinq à sept ans d’expérience, capables de démarrer sur les chapeaux de roue, d’extraire les données et de produire une hypothèse. » Sans oublier d’ajouter qu’« il y a une forte demande pour ce type de profils. »
Ben Hodzic poursuit en précisant que tout en paraissant juniors à première vue, les titulaires d’un doctorat en finance quantitative sont en réalité perçus comme des profils expérimentés. « On pourrait penser qu’à l’issue de leur doctorat, ces jeunes diplômés sont promis à des postes au bas de l’échelle ; mais si vous sortez de l’une des meilleures universités dans le domaine, avec des années de recherche à votre actif, vous commencez généralement à un niveau intermédiaire, voire senior, et on estime que vous savez travailler seul. »
Ce sont en revanche les jeunes diplômés de licence et masters qui se retrouvent sur le pavé, ajoute-t-il.
La situation est sans doute pire à Londres. Une chasseuse de têtes rappelle le nombre croissant de quants juniors désormais en recherche d’emploi, suite aux réductions d’effectifs de plusieurs fonds quantitatifs comme Winton Capital Management l’an dernier (Winton est passé en 2019 de 296 à 230 employés, et aurait procédé à d’autres licenciements en novembre dernier). « C’est dur pour les juniors en ce moment, » dit-elle. « On recrute beaucoup plus de quants senior, gestionnaires de portefeuilles ou de leurs composantes. » C’est ainsi que Winton vient de débaucher John Ward de Green Park Research, où il était déjà gestionnaire de portefeuille.
Quant aux nouveaux recrutements dans un avenir proche, le fonds souverain des émirats - Abu Dhabi Investment Authority (ADIA) - semble bien être en phase ascendante après l’embauche en décembre dernier de Thomas Schmelzer. L’ancien responsable de la recherche quantitative chez Lobnek Wealth Management à Genève a rejoint l’ADIA au poste de Quantitative Reseach & Developement Lead.
Thomas Schmelzer est titulaire d’un doctorat en mathématiques et analyse numérique de l’Université d’Oxford. Les aspirants quants seraient sans doute bien inspirés de viser une qualification similaire : « le doctorat est le meilleur moyen pour vous consacrer à vos recherches sans dépendre d’une entreprise, » relève Ben Hodzic. « Ce sera un argument de poids pour vous vendre sur le marché. »
Et si vous n’avez ni le temps, ni l’argent, ni même l’envie de vous lancer dans un doctorat en finance quantitative ? Ben Hodzic conseille de vous tourner dans un premier temps vers des postes en données dans les fintech ou chez les fournisseurs de technologie. « Quand vous aurez travaillé sur différents projets en Data Analytics avec divers flux de données, un hedge fund verra au moins qu’il n’aura pas besoin de vous tenir la main s’il décide de vous embaucher. »
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